Plus que quelques jours avant le départ de la délégation CATEL en direction de HIMSS 2025. L'occasion pour nous de poser quelques questions à Charles AMAUDRUZ, Directeur du Parcours Patient PISAM, co-fondateur de Leaders for Health et membre de la délégation sur sa vision actuelle et ses attentes vis-à-vis du voyage d'étude.
Comment, à travers vos expériences, avez-vous vu la transformation numérique modifier le parcours patient ?

"Le digital a profondément transformé le parcours patient. Aujourd’hui, tout est plus fluide et mieux organisé. L’information en temps réel entre les professionnels de santé garantit une meilleure coordination et une continuité des soins sans rupture. Mais le vrai changement, c’est pour le patient. Il peut prendre rendez-vous en ligne, accéder à ses résultats médicaux, préparer ses démarches en avance. Résultat : moins d’attente, moins de stress, plus d’autonomie. Côté équipes, le numérique libère du temps. Moins de tâches administratives, plus de disponibilité pour la relation avec les patients. Et avec des indicateurs précis, chaque étape du parcours est optimisée pour améliorer l’expérience patient et la qualité de prise en charge.
Cependant, cette transformation n’est pas homogène. Si certaines structures ont pleinement intégré le digital, d’autres restent encore à la traîne. L’enjeu des prochaines années sera d’assurer une adoption cohérente et efficace des outils numériques, pour que chaque patient bénéficie d’un parcours fluide, sans friction et centré sur ses besoins."
Comment la télémédecine est-elle perçue par les patients et les professionnels de santé ?
"La télémédecine s’est imposée comme un outil clé dans le suivi des patients, notamment pour la gestion des pathologies courantes, le renouvellement d’ordonnances et les consultations de suivi. Elle apporte une flexibilité précieuse, réduit les délais d’accès aux soins et améliore la continuité de prise en charge, notamment pour les patients éloignés des centres de santé.
Mais son développement connaît aussi des limites. Pour les pathologies plus complexes, les consultations nécessitant un examen physique ou les annonces médicales sensibles, le contact humain reste essentiel. Certaines choses ne peuvent pas être captées à travers un écran : une expression, une hésitation, un ressenti qui peut tout changer dans une prise en charge.
Côté professionnels de santé, la perception évolue. Certains y voient une opportunité pour optimiser leur temps, d’autres restent plus prudents face aux risques de déshumanisation ou de consultation incomplète. Le défi est de trouver le bon équilibre entre digitalisation et présence physique, en faisant de la télémédecine un levier qui complète et renforce la relation soignant-patient, sans jamais la remplacer.
Le digital ne doit pas être une barrière, mais un pont entre le soignant et le patient. Trouver cet équilibre, c’est tout l’enjeu des prochaines années."
Quelles innovations numériques attendez-vous dans les prochaines années qui transformeront encore davantage le parcours patient ?
"L’innovation doit être au service d’un parcours plus fluide, plus fiable, plus réactif et plus centré sur le patient. Ce n’est pas la technologie en elle-même qui transforme la santé, mais la manière dont elle simplifie l’expérience des patients et des soignants.
Prenons l’exemple d’une consultation médicale. Demain, grâce à l’écoute ambiante, le médecin n’aura plus besoin de saisir ses notes ou de jongler entre différents outils. L’IA captera les échanges en temps réel et générera automatiquement les actions nécessaires : prescription d’examens, renouvellement d’ordonnances, prise de rendez-vous de suivi. Le médecin pourra se concentrer pleinement sur son patient, sans être happé par l’écran.
Cette automatisation ne remplace pas le soignant, elle lui redonne du temps. Moins de tâches administratives, plus d’écoute, une prise en charge plus fluide et plus personnalisée.
Mais ces innovations ne fonctionneront que si l’organisation suit. Aujourd’hui, beaucoup d’outils existent, mais mal intégrés, ils deviennent plus des freins que des leviers. Sans structuration, l’IA et les outils numériques ne seront que du « shit in, shit out ». L’innovation doit avant tout être un levier d’efficacité, au service du soin et de l’humain."
Le numérique peut-il nuire à l’aspect humain du parcours patient ?
"Le numérique est un formidable outil, mais il ne doit jamais prendre le pas sur l’essentiel : la relation humaine.
Le risque, c’est de tomber dans l’obsession des écrans et des données, au point d’oublier qu’un patient n’est pas un simple ensemble d’indicateurs, mais une personne avec des émotions, des doutes et des attentes. La technologie doit être un levier pour améliorer la prise en charge, pas un filtre qui éloigne soignants et patients.
L’autonomie du patient, c’est bien, mais elle a ses limites. Tout digitaliser ne signifie pas abandonner l’accompagnement. L’enjeu est d’offrir des outils pour simplifier son parcours, tout en maintenant un contact humain à chaque étape clé.
Enfin, les gains d’efficacité ne doivent pas être synonymes de réduction des interactions humaines. Les économies réalisées grâce au numérique doivent être réinvesties dans ce qui compte vraiment : du temps supplémentaire pour l’écoute, l’accompagnement et la qualité de la relation soignant-patient.
Le digital est un accélérateur, mais c’est l’humain qui doit rester au cœur du parcours de soins."
Quelles sont vos attentes vis-à-vis du voyage d'étude organisé par Catel sur HIMSS 2025 ?
"La visite du congrès HIMSS et d’Intermountain Health seront de belles opportunités de nous plonger au cœur des innovations qui redéfinissent le parcours et l’expérience patient. Les États-Unis ont une longueur d’avance, non seulement sur la digitalisation des parcours de soins, mais surtout sur la maturité de leur vision en matière d’expérience patient. Leur approche repose sur une intégration fluide du numérique au service d’un parcours plus simple, plus personnalisé et plus efficace.
Mais au-delà des découvertes sur place, c’est aussi l’expérience de la délégation Catel qui donnera toute sa valeur à ce voyage. Réunir une cinquantaine de professionnels issus d’univers variés, du public comme du privé, c’est créer un véritable espace d’échange et de réflexion. C’est souvent dans ces discussions que naissent les idées les plus innovantes.
Revenir inspiré, challengé, avec des idées concrètes à mettre en œuvre : c’est tout l’intérêt de cette immersion."
Pouvez-vous nous en dire plus sur Leaders for Health ?
"Leaders for Health est une association à but non lucratif, née d’une conviction forte : réunir une communauté de leaders déterminés à transformer le système de santé. Avec Félix MAMOUDY, nous avons voulu créer un espace où celles et ceux qui façonnent l’avenir de la santé peuvent échanger, apprendre et s’inspirer les uns des autres.
Ce n’est pas juste un réseau, c’est un mouvement. Un lieu où des soignants, managers, entrepreneurs et décideurs partagent une même ambition : faire évoluer l’organisation des soins et améliorer l’expérience patient.
Dans cette dynamique, nous avons lancé le podcast « Raison d’être », une série de conversations avec des leaders expérimentés. À travers leur parcours, leurs échecs et leurs réussites, ils partagent leurs meilleures leçons et conseils pour piloter le changement.
Et ce n’est que le début ! Leaders for Health, c’est une communauté en mouvement, qui grandit et qui construit, jour après jour, le leadership de demain en santé."
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